Interview de Olivier Gerspacher : l’exportation, l’enjeu du moment

10.10.2025 | News

En parallèle au développement de produits et de partenariats, Olivier Gerspacher conseille d’importantes entreprises suisses en matière d’exportation, notamment dans le domaine des produits laitiers et des vins.

Dans cette interview, il répond aux enjeux actuels en matière d’exportation de produits suisses et donne ses conseils aux producteurs.

 

Quels sont les enjeux actuels en matière d’exportation de produits suisses ?

Si je prends l’exemple du marché des États-Unis que je connais bien, les pénalités aujourd’hui pour atteindre ce marché repose sur le franc fort premièrement, et bien sûr les taxes douanières. Mais selon moi, il existe d’autres ombres au tableau. Premièrement, le manque de reconnaissance du label AOP, qui pourtant est une force de frappe importante pour nos produits suisses. Ensuite, du côté des plus petits producteurs, ils ne possèdent pas toujours les connaissances nécessaires pour exporter leurs produits, pensant souvent que de gros volumes sont nécessaires. Ceci dans un contexte où les transporteurs ne cherchent pas non plus ce genre de clients, au bénéfice des gros acteurs du marché. Enfin, l’interprofession pourrait aider davantage les laiteries et fromageries indépendantes au-delà de l’aspect marketing en mettant plus d’actions pour les aider à exporter leurs produits.

 

Si l’on veut éviter les États-Unis, faut-il alors éventuellement se tourner vers la Thaïlande ou Dubaï ?

Ces deux marchés sont intéressants car ils comportent de grandes communautés suisses, françaises, russes ou encore belges qui connaissent nos produits et les adorent. C’est aussi des grands hubs de voyageurs, avec un grand nombre d’hôtels et de restaurants riches en  diversité culturelle et plats nationaux. D’importants acteurs suisses du fromage se partagent le marché international avec la distribution de fromages populaires ou encore les fondues prêtes à l’emploi non AOP.

 

Comment faire pour mieux valoriser les produits AOP à l’international ?

Le problème principal réside dans le fait que la plupart des consommateurs, dont les touristes, peinent à identifier un produit AOP d’un produit non AOP. En résulte une différence de prix non négligeable entre ces deux catégories de produits. C’est précisément là que se situe la confusion : l’incompréhension sur les prix des fromages. Par manque de connaissance, les consommateurs s’orientent vers les produits les moins chers. Heureusement, des épiceries fines et de magasins spécialisés en fromages vendent des produits de qualité AOP, mais ils restent minoritaires. L’une des solutions serait de laisser davantage de place aux plus petits producteurs pour l’exportation de leurs produits AOP. Une autre solution repose sur l’éducation et l’accompagnement des consommateurs sur place, à travers des événements de dégustations et de valorisation de nos produits AOP dans des événements à portée internationale comme les Jeux Olympiques par exemple. Au final, c’est l’image de la Suisse qui est en jeu à travers la qualité des produits qu’elle exporte.

 

Quels conseils donneriez-vous à un producteur suisse qui souhaite exporter ses produits ?

Il faut tout d’abord réaliser une étude de marché et vérifier si la communauté suisse est présente sur la zone visée. Une autre astuce pourrait être de vérifier si du vin suisse y est déjà distribué car vins et fromages vont très souvent de pair. L’exportation peut s’effectuer via deux canaux principaux : en départ direct de Suisse ou via un canal de distribution ou de transport spécialisé. Les petits producteurs suisses devraient au mieux proposer à l’exportation des produits premium AOP et trouver des importateurs d’épiceries fines. Le célèbre marché de produits frais Rungis à Paris est également un puissant canal, étant une plateforme mondiale entre vendeurs et acheteurs. Ensuite, il est essentiel de se rapprocher d’une société de logistique spécialisée dans la chaîne du froid, par avion, voie maritime ou transport routier, qui pourront les aider à comprendre l’ensemble de la chaine jusqu’à l’emballage et aux coûts, en passant par la partie administrative, les étiquettes et déclarations douanières par exemple. C’est un processus complexe et il est nécessaire de se faire accompagner par des professionnels de l’exportation.